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AudeOccitanie

Au cœur du Lauragais

Une virée au cœur du Lauragais, à travers les collines de la Piège et les coteaux de la Malepère, des noms qui chantent l’aventure. Ce que j’aime ici ce sont les courbes vallonnées du paysage, les terres  brunes fumantes de  brouillard l’hiver,  les ondulations blondes de blé ou couleur soleil des tournesols  au début de l’été, les hauteurs ponctuées d’églises aux clochers reconnaissables ou de moulins.  Il faut ressentir le vent d’Autan qui donne l’impression de ne jamais vouloir s’arrêter.  L’hiver souvent la vue porte sur les sommets enneigés et pointus des Pyrénées au sud et sur les sommets sombres et arrondis de la Montagne Noire à l’est.

De Laurac à Lauragais

La balade d’aujourd’hui nous mène au cœur du Lauragais, dans le village qui a donné son nom à la région, Laurac. Quand on arrive par la route en contrebas, on distingue des maisons serrées les unes contre les autres comme agrippées au piton rocheux. Difficile alors d’imaginer le joli village qui se situe tout là-haut.
Pour y accéder, il faut franchir un petit pont en pierre qui enjambe un fossé et débouche sur une ruelle étroite et raide. Tellement étroite qu’il n’y a pas de place pour des trottoirs. Les maisons donnent directement sur la rue, des maisons à un étage avec des volets colorés qui donnent une touche de gaieté à la rue. Plusieurs ruelles montent vers l’église. Ici vivaient au 11ème siècle les seigneurs de Laurac, dont le castrum se situait au plus haut point de ce piton, dominant le sillon Lauragais, une voie stratégique entre Méditerranée et Atlantique. Des vestiges des fortifications sont encore accolées au pont, notamment les murs de la Porte Saliège.

Aujourd’hui, le château a disparu. C’est une croix qui se situe au plus haut dans le village et d’où l’on a un joli point de vue sur le paysage vallonné. Juste en dessous de la croix se trouve l’église et son clocher carré. Sa silhouette massive se veut «une manifestation de la puissance de l’église sur des terres reconquises à l’hérésie cathare » (panneau d’information aux pieds de l’église). Car ce village fut un haut lieu du catharisme. C’est ici que vécut Blanche de Laurac, qui, à la mort de son mari se convertit au catharisme et transforma sa maison en lieu d’accueil des « parfaites », c’est-à-dire des femmes adeptes de la religion cathare. Ses enfants connurent un destin tragique, notamment l’un de ses fils qui fut exécuté par Simon de Montfort ; l’une de ses filles, Guiraude, fut, quant à elle, jetée dans un puits pour avoir refusé de livrer les cathares. En redescendant, nous passons devant ce qu’il reste de sa maison, « le mur de Blanche », tandis qu’un peu plus loin est exposé un buste sculpté représentant Dame Guiraude.

Fanjeaux et son parcours artistique

Fanjeaux, à une dizaine de kilomètres de Laurac, est un village typique du Lauragais : un de ces villages que l’on repère de loin grâce à son clocher qui détache dans le ciel ; un village perché et qui fut pour cette raison occupé dès l’époque gallo-romaine ; un village qui abrita des cathares et une maison des Parfaits ; un village où les ruelles étroites invitent à la découverte, une découverte ponctuée de sculptures en fer. C’est l’originalité de ce village et elle m’a bien plu. Chaque sculpture raconte un pan de l’histoire de ce lieu : ainsi, on croise Saint Dominique montrant du doigt des boules de feu tombant du ciel ; il décida de construire un monastère à l’endroit de leur impact (on en reparlera plus bas). Saint Dominique – à l’origine Dominique de Guzman – s’était installé ici pour combattre le catharisme, alors bien ancré dans la région et tout particulièrement à Fanjeaux qui abritait une maison des parfaits. Il organisa plusieurs « disputes », des joutes orales où catholiques et cathares tentent de faire valoir leurs points de vue. L’une de ces disputes aurait même laissé des traces visibles dans le couvent des frères prêcheurs situé au centre du village : aucune des parties ne parvenant à prendre le dessus, il fut décidé de jeter au feu une Bible et de voir ce qu’il se passait. Au contact des flammes, le livre fut projeté au plafond et laissa des traces de brûlures sur les poutres.

On peut voir au Seignadou des personnages représentés en pleine « disputation ». Le Seignadou est une terrasse située à l’extrémité du village. De là s’étend un beau point de vue sur le sillon Lauragais jusqu’à la Montagne Noire. Le nom vient du latin « Signum Dei », le signe de Dieu : il fait référence aux boules de feu que Saint Dominique auraient vu tomber du ciel. Il décida de construire un monastère à l’endroit où elles tombèrent. Aujourd’hui, on aperçoit en contrebas de la colline un bâtiment singulier qui émerge des arbres. Le style est différent de tout ce qu’on peut voir dans le Lauragais . Il ferait plutôt penser à une église orthodoxe, tout en rondeur et courbes. C’est le fameux monastère de Saint Dominique. Nous notons l’emplacement pour aller y faire un tour ensuite.

En déambulant dans le village, j’ai pu aussi voir une halle couverte au centre du village entourée de maisons où ici aussi, les habitants se sont plus à mettre de la couleur, qui avec une porte rouge, cet autre en exposant des poteries ou encore ce salon de thé rue du Four.  Il y a quelques belles maisons à colombages dont la « maison six sous », ainsi appelée car la dame qui vivait là autrefois demandait l’aumône aux passants pour élever ses enfants.

J’ai beaucoup aimé aussi dans ce village le lavoir et ses deux bassins triangulaires gardés par un angelot. Enfin, il ne faut pas quitter le village sans traverser le pont à l’entrée pour aller voir la croix discoïdale qui date du 13ème siècle. Malheureusement, les symboles qu’elle porte, une main bénissant d’un côté et un agneau de l’autre, ne sont presque plus visibles.

En quittant Fanjeaux, nous nous dirigeons donc vers le monastère Sainte Marie de Prouilhe : c’est ici que Dominique de Guzman (Saint Dominique) fondit une communauté qui allait préfigurer l’ordre des Dominicains. Au départ, il s’agissait de reconvertir les habitants alors ralliés au catharisme. Saint Dominique convainquit neuf femmes de s’y installer. Aujourd’hui encore, le lieu est occupé par des moniales qui tiennent une hostellerie dans la quelle elles accueillent entre autres des pèlerins de Saint Jacques de Compostelle. Si, vu de l’extérieur, le bâtiment est imposant, l’intérieur est pour l’instant vide et en totale réfection. C’est vraiment étonnant de trouver un tel bâtiment ici.

Montréal et sa collégiale

Nous quittons la Piège pour nous diriger encore un peu plus à l’est. Nous voici dans le massif de la Malepère avec ses rangs de vignobles. Malepère, en occitan « Male peyre» c’est-à-dire mauvaise pierre… ainsi qualifiée car la pierre que l’on trouve ici – et qui a été utilisée pour les constructions – a tendance à s’éroder et à s’effriter avec le temps. Mais la Malepère, c’est aussi, depuis 2007, une AOC qui produit des vins rouges et rosés.
Le massif est relativement petit, une quinzaine de kilomètres de long pour environ sept de large. Il abrite seulement cinq villages ; Montréal, situé à son extrémité occidentale, est le plus grand. On le reconnaît de loin grâce à son église, un bâtiment plutôt imposant. Construite au 12ᵉ siècle, elle marquait la volonté de l’Église catholique de s’imposer face aux cathares ; elle a été érigée en collégiale au 14ᵉ siècle puis transformée en forteresse aux temps des guerres de religion. Quand on pénètre à l’intérieur, on découvre une immense nef de style gothique. Elle est richement ornée, les murs sont intégralement recouverts de motifs ; le chœur accueille pas moins de 66 stalles en bois sculptées. Une visite à ne pas manquer.

À voir également à Montréal, la terrasse de l’Espérou, à l’arrière de la collégiale, avec un beau point de vue sur le sillon Lauragais et la Montagne Noire, tandis qu’à l’opposé du village, depuis la Porte du Razès, on peut voir les sommets enneigés des Pyrénées. En traversant le village, on peut découvrir un passage couvert qui mène au « puits banal », un puits installé pour les habitants dès le Moyen Âge et qui servit jusqu’au 20ᵉ siècle.

Trois villages visités, trois visages différents, qui, pour peu que l’on prenne le temps de s’y attarder, dévoilent une grande richesse historique et offrent de superbes points de vue. Mon coup de cœur va à Laurac pour sa situation et sa physionomie. Mais j’ai bien aimé visiter Fanjeaux de sculpture en sculpture. Quant à Montréal, j’ai vraiment été très surprise par son imposante collégiale. N’hésitez pas à partager vos impressions en commentaires, je les découvrirai avec plaisir !

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