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La Yellowhead Highway se situe au Canada ; elle relie Winnipeg, dans le Manitoba, à Prince Rupert, situé au nord de la Colombie Britannique, au bord de l’océan Pacifique. Nous l’avons empruntée sur plus de 1000 kilomètres avec l’impression d’être au bout du monde. Nous avons débarqué à Prince Rupert au milieu de la nuit après une magnifique croisière au milieu des fjords canadiens, de Tofino au nord de l’Île de Vancouver jusqu’à Prince Rupert. Il est alors plus de minuit ; le temps de monter les bagages et de se coucher, la nuit fut très courte et la grasse matinée s’est imposée. Voilà maintenant 9 jours que nous sommes sur la route et la fatigue commence à se faire sentir. Du coup, nous quittons Prince Rupert en fin de matinée, presque sans nous retourner, juste le temps de faire un petit tour en voiture dans la ville. J’avoue qu’avec le recul, je le regrette un peu.
Prince Rupert
Prince Rupert est une ville portuaire située à l’embouchure de la Skeena, rivière que nous allons suivre jusqu’aux Rocheuses. Elle est bâtie sur l’île de Kaien et est bordée par des montagnes recouvertes de cèdres et d’épinettes, la Great bear Rainforest (autrement dit la forêt pluviale du Grand Ours). Elle n’est pas très grande, elle s’étire en suivant la côte et se heurte rapidement aux montagnes. À l’extrémité nord se trouve une base pour les hydravions ; c’est l’une des plus importantes du pays. Plusieurs petits avions sont amarrés ; des voyageurs embarquent, des pilotes inspectent leur machine. C’est un nouveau visage que nous offre le Canada.
À la sortie de la ville, nous découvrons une usine de bois. Le site est immense. Je n’avais jamais vu autant de billes de bois, il y en a des milliers ; d’énormes tracteurs s’affairent à les déplacer. On peut s’en approcher en empruntant le Butze Rapid trail. C’est un sentier qui forme une boucle d’un peu plus de 5 km, très facile à faire, et qui permet d’atteindre des rapides à travers la forêt. Il y a des arbres aux formes incroyables et de beaux points de vue sur la montagne. Un belvédère surplombe les rapides. C’est vraiment un lieu magnifique, un lieu baptisé le domaine du loup… mais de loup, nous n’en avons point vu !
Une route sauvage
Nous quittons ensuite définitivement le site de Prince Rupert pour « attaquer » la Yellowhead Highway, littéralement la route de la tête jaune en souvenir du guide métis, Pierre Bostonais surnommé « tête jaune » en raison de ses cheveux blonds. Nous allons la suivre sur plus de 1000 kilomètres de Prince Rupert jusqu’à Jasper dans les Rocheuses. Elle traverse des paysages très différents passant des plaines aux montagnes et vice-versa, traversant de rares villes comme Smithers ou Prince George, l’occasion de faire des étapes pour couper ce long trajet.
Le tronçon que nous allons emprunter aujourd’hui, de Prince Rupert à Terrace, est réputé pour être le plus beau trajet à faire en voiture au Canada. La route longe la rivière et dévoile des paysages à couper le souffle. La nature est présente partout tout autour de nous. La vallée s’élargit et se rétrécit continuellement. Pas un seul village en bordure de route, et ce jusqu’à Terrace soit 144 km sans voir une seule habitation. Quant au trafic, il est plus que clairsemé ; nous croisons quelques camions rutilants et chargés de longs billots de bois.
Après Terrace, le paysage change un peu, il est légèrement moins sauvage. Régulièrement le long de la route, nous croisons quelques maisons en bois ; des chemins s’enfoncent dans l’épaisse forêt. Nous arrivons au croisement de la route qui mène en Alaska, la Stewart-Cassiar Highway, probablement un endroit stratégique car, ici, se trouve au milieu de nulle part une station service. En fait, elle n’est pas vraiment au milieu de nulle part…
Totems et pêche aux saumons
De l’autre côté de la rivière se trouve le village de Kitwanga, mais la forêt qui borde notre route est tellement épaisse que nous ne distinguons rien ! Piqués par la curiosité, nous franchissons le pont et prenons un chemin qui mène au cœur du village. Nous y découvrons quelques maisons éparpillées et une église en bois. Mais surtout, nous sommes intrigués par les nombreux totems sculptés qui se dressent là, le plus souvent en bois brut. Ils ont l’air assez vieux. Certains sont entièrement sculptés, d’autres ont l’air inachevés. Un habitant vient discuter avec nous. Il nous explique que ces totems ont 300 ans. Sur la route qui monte vers l’Alaska, il y a une vingtaine de villages avec, à leur tête, des chefs indiens : le plus jeune a 25 ans et le plus âgé 80 ans. Une belle rencontre avec ce monsieur tout heureux de nous raconter son histoire et qui nous donne envie de pousser un peu plus loin en direction du nord ; mais nous avons encore pas mal de kilomètres à faire avant d’arriver à notre étape du soir, Smithers.
Les kilomètres défilent, les montagnes continuent de nous entourer mais sont moins hautes. Nous sommes toujours tout seul sur la route. Nous tardons à nous arrêter pour déjeuner. Nous voulons rejoindre Hazelton où se trouve la reconstitution d’un village « gitksan », le Ksan Historical Village and Museum (1800) avec ses maisons, ses ateliers de sculpture, ses totems. Gitksan signifie « peuple de la brume de la rivière », un peuple autochtone qui s’était établi le long de la rivière Skeena. Mais pris par la beauté des paysages, nous avons pas mal lambiné et nous arrivons trop tard d’une petite demi-heure : le musée vient de fermer. Nous avons pu toutefois nous promener sur le site, au milieu des maisons en bois foncé ornées de motifs colorés. Ici aussi, il y a de nombreux mats totémiques devant chaque maison. Par contre, il n’y a aucun panneau explicatif, et nous le regrettons bien, car il est difficile de trouver des informations sur cet endroit.
Nous reprenons la route. Il y a finalement peu d’occasion de voir la rivière, la route s’en éloigne assez souvent. À un moment toutefois, nous avons quitté la route pour nous en approcher. Elle est encore bien large et le courant y est très fort, comme dans un torrent. Elle roule de gros galets. Plus loin, nous franchissons un pont à une seule voie, Le pont Hagwilget. C’est un pont suspendu qui enjambe un canyon de 80 mètres et qui a été construit en 1930.
Dernière étape de cette journée, Moricetown. Il y a ici le canyon Witset, un canyon où les autochtones pêchent dans les rapides à l’aide de grandes épuisettes, une technique ancestrale. Ils attrapent le poisson au vol à l’aide de longues perches lorsque celui-ci remonte les chutes. Il faut voir ces pêcheurs en équilibre sur les rochers, c’est vraiment impressionnant.
De Smithers à Prince George
Une nouvelle longue journée de voiture nous attend, une journée qui va nous faire découvrir des images aux antipodes l’une de l’autre, avec des gens d’un autre temps et un énorme hydravion.
Nous avons passé la nuit à Smithers, une ville dominée par la Hudson Bay Mountain. En dehors de ça, je n’ai pas trouvé que la ville présentait un attrait particulier. Nous optons donc pour une petite randonnée pour voir des cascades. Comme elles sont situées sur le versant de la Hudson Bay Mountain, nous espérons voir le glacier de plus près. Mais non, nous ne le verrons pas. Ce fut en tout cas une jolie balade. Le sentier longe un torrent, le Glacier Gulch Creek. Après une petite montée, on parvient à une plateforme qui permet de voir les deux cascades. Il est possible de continuer plus avant pour s’approcher du glacier mais le sentier est plus chaotique et par endroit dangereux. Nous préférons laisser tomber.
Direction ensuite Prince George, notre étape de ce soir. À nouveau, les montagnes s’éloignent et la vallée s’élargit. J’ai repéré sur des brochures un petit marché fermier à Burns Lake, l’occasion de faire quelques courses pour le repas de midi. Grave erreur ! En fait, ça n’a rien à voir avec nos marchés de villages en France. Ici, nous trouvons juste un petit étal tenu par deux dames en robes longues et bonnets d’un autre âge. Elles vendent leurs gâteaux (très bons au demeurant) et quelques carottes… Notre déjeuner sera donc composé de cookies au M&M’s et de tartes aux pommes. Nous les dégusterons au bord du lac Fraser, un immense lac. Ici, un magnifique spectacle nous attend : nous avons la chance d’assister à la préparation et au décollage d’un gros canadair rouge. Pour le calme, c’est un peu raté, mais nous avons été impressionnés par le décollage. Il lui a fallu une sacrée longueur avant de pouvoir s’élever dans les airs.
La route ensuite est plus monotone, un peu longue. Ce soir, nous dormons à Prince George située au cœur de la Colombie Britannique. Avec plus de 70 000 habitants, c’est un grand centre urbain au croisement de deux importants axes routiers, la Yellowhead Highway et la route 97 qui traverse la province du nord au sud. Une ville avec des airs américains dans l’architecture de ses bâtiments.
Au bout de la route, les Rocheuses
C’est plein d’entrain que nous prenons la route pour le dernier tronçon de ce long trajet. Ce soir, nous serons dans le parc national de Jasper ! À nouveau, les montagnes nous entourent. Elles seront de plus en plus présentes, de plus en plus proches tout au long de la journée. Les kilomètres défilent et nous sommes pratiquement seuls sur la route. Mais bientôt, nous allons commencer à entrevoir ce qui nous attend dans les Rocheuses, des rencontres fantastiques. Oui, comme cet ours qui déboule tout à coup devant nous. Nous avons à peine le temps de reprendre nos esprits et de le photographier ! Nous atteignons Mac Bride à l’heure du pique-nique. Il y a une aire pour se poser d’où l’on peut rejoindre un belvédère, celui de Teare Mountain. De là, il y a une vue magnifique sur deux grands sommets : le Mont Robson, le plus haut des Rocheuses avec 3954 mètres et le Teare Mountain.
Nous sommes maintenant dans le parc provincial du Mont Robson. Juste après l’entrée du parc se trouvent les Overland Falls. Elles ne sont pas très hautes, environ 10 mètres de haut, mais le débit est impressionnant. Les eaux turquoises dévalent à grand fracas au milieu des sapins. La route longe ensuite deux lacs tout en longueur, le lac Moose (qui signifie « orignal ») et le lac Yellowhead. Nous quittons la Colombie-Britannique pour entrer dans l’Alberta. Devant nous, le Mont Robson, énorme, écrasant nous attire comme un aimant. Nous passons le poste d’entrée du parc de Jasper au col Yellowhead… et nous avançons nos montres d’une heure, car nous entrons dans le secteur « Moutain Time ».
Mon avis sur ce trajet
La première journée jusqu’à Smithers – nous a beaucoup plu. Elle nous a permis de découvrir une autre image du Canada, plus sauvage, plus profond, plus isolé, avec ses montagnes immenses recouvertes d’une épaisse forêt, ses rivières tumultueuses, ses maisons en bois et leurs totems patinés par le temps ; la dernière journée avec l’arrivée dans les Rocheuses est grandiose, le Mont Robson domine littéralement le paysage. Il n’y a que la seconde journée qui nous a paru un peu longue car les paysages étaient plus monotones et aussi parce que les grandes villes traversées ne nous ont pas vraiment attirés. Au final , je trouve vraiment que c’est un trajet à faire. Je recommanderais de prendre un peu plus de temps sur la première partie pour visiter Prince Rupert et aussi pour pouvoir davantage échanger avec les quelques habitants que nous avons rencontrés.
Le coin pratique
- Les distances (compter environ 5 h 00 pour chaque trajet) :
- Prince Rupert / Smithers : 350 km
- Smithers / Prince George : 375 km
- Prince George / Jasper : 375 km
- Un point d’attention sur la première partie du parcours notamment : faire le plein sans trop attendre, les stations services sont rares, environ tous les 100 kms.
- Sur le blog, vous trouverez deux autres articles en lien avec ce roadtrip :
- Roadtrip dans les Rocheuses
- Canada, façade Pacifique, traversée de l’île de Vancouver et Inside Passage jusqu’à Prince Rupert
- Des informations sur ce que représentent les totems de Kitwanga sur le site Simon Fraser University